Tomber enceinte, vivre une grossesse, donner la vie : pour certains couples, cela semble naturel, presque évident. Mais pour d’autres, ce chemin s’apparente à une véritable épreuve, jalonnée de douleurs, de deuils et de protocoles médicaux lourds.
Dans cet épisode du podcast Prélude, Caroline, maman de trois enfants dont le dernier est né après un long parcours d’infertilité, raconte avec émotion son expérience : une fausse couche bouleversante, plusieurs tentatives de procréation médicalement assistée (PMA), et enfin, une grossesse naturelle inespérée qui a donné naissance à une petite fille en 2020.
À travers ce récit intime, nous découvrons la réalité de la PMA et la résilience nécessaire après une fausse couche. Cet article résume son parcours tout en apportant un éclairage sur les aspects médicaux, psychologiques et humains de cette traversée. Si vous traversez vous aussi des difficultés dans votre parcours de grossesse, j'espère qu'il pourra vous donner quelques clés, et surtout vous inspirer l'espoir pour garder le moral pendant cette période si compliqué.
Caroline : un parcours de maternité atypique
Caroline a 44 ans au moment de l'enregistrement de ce podcast. Elle est déjà maman de deux enfants issus d’une première union : une fille de 20 ans et un garçon de 12 ans. Séparée de leur père, elle refait sa vie et se marie en 2017. Son nouveau mari n’a jamais eu d’enfant et, peu à peu, l’envie de devenir parents ensemble s’installe.
La décision n’est pas immédiate : au départ, leur couple s’épanouit dans une vie à deux, entre la garde alternée des enfants et les moments de complicité. Mais rapidement, le désir de paternité de son conjoint se renforce, et Caroline accepte d’essayer, malgré une appréhension liée à son âge.
La joie d’une grossesse… et la douleur de la fausse couche
Un espoir rapidement brisé
Quelques mois après son mariage, Caroline tombe enceinte naturellement, à 40 ans. L’annonce est un moment d’euphorie : son mari n’a jamais été aussi heureux. Mais à la deuxième échographie, le verdict tombe : le cœur du bébé s’est arrêté.
Cette perte brutale, autour de la 10ᵉ semaine, est un choc. Caroline doit subir une aspiration sous anesthésie générale.
Elle découvre alors la violence émotionnelle de la fausse couche, une expérience qui dépasse largement la seule dimension médicale. À l’hôpital, Caroline doit patienter dans une salle d’attente où se côtoient des femmes enceintes venues pour des examens de routine ou pour accoucher. Ce contraste est insupportable : alors que certaines s’apprêtent à recevoir une “bonne nouvelle”, elle sait déjà que la sienne s’est transformée en drame.
L’intervention en elle-même – une aspiration sous anesthésie générale – est vécue comme une étape froide et impersonnelle, loin de l’image qu’elle s’était faite de la maternité.
Mais ce qui pèse le plus, c’est le sentiment d’échec intime : la conviction que son corps l’a trahie, que son âge est un obstacle insurmontable, et qu’elle est “périmée” en tant que femme capable de donner la vie. Ce mélange de douleur physique, de solitude dans le parcours médical et de culpabilité intérieure rend l’épreuve particulièrement dévastatrice.
La fausse couche : un deuil invisible
Pour Caroline, comme pour de nombreuses femmes, la fausse couche n’est pas une simple “complication médicale” que l’on efface d’un trait dans un dossier. C’est un véritable deuil, d’autant plus difficile à vivre qu’il est rarement reconnu comme tel.
Dès le test de grossesse positif, l’enfant existe déjà : il est imaginé, projeté dans un avenir, parfois même nommé. On pense aux prénoms, à la maternité où l’on accouchera, à la nouvelle organisation de la famille. La perte met fin non seulement à une grossesse, mais aussi à un rêve, à une histoire commencée à deux.
Ce deuil est d’autant plus violent qu’il est souvent invisible. Il n’y a pas de rituels sociaux pour l’accompagner, pas de cérémonies pour reconnaître cette perte. L’entourage, parfois maladroit, banalise l’expérience en phrases toutes faites comme “tu es jeune, tu en auras d’autres” ou “c’était sûrement mieux ainsi”. Ces paroles, loin de réconforter, accentuent le sentiment de solitude et d’incompréhension.
Caroline prend alors conscience que la fausse couche touche l’intime au plus profond : elle vient remettre en cause la confiance en son corps, raviver la peur du temps qui passe et faire naître une culpabilité injustifiée (“c’est ma faute, je n’ai pas su garder ce bébé”). Ce poids psychologique, trop souvent minimisé, est en réalité immense.
Aujourd’hui, la parole commence à se libérer. Des témoignages de femmes circulent dans les médias, les réseaux sociaux et les podcasts. Des associations militent pour que la fausse couche soit reconnue comme un deuil à part entière et que les femmes puissent bénéficier d’un meilleur accompagnement psychologique. Mais le tabou demeure encore fort : beaucoup préfèrent se taire, par peur du jugement ou par manque d’espace d’écoute.
Ainsi, le vécu de Caroline illustre parfaitement ce paradoxe : un deuil profondément ressenti, mais rarement reconnu, qui impose aux femmes une double souffrance – celle de la perte et celle du silence.
Le parcours de PMA : un chemin semé d’embûches
Après la fausse couche, le couple passe une batterie de tests. Les résultats tombent : réserve ovarienne très faible pour Caroline, spermogramme catastrophique pour son mari. Selon les médecins, leur première grossesse était presque un miracle. Leurs chances de concevoir à nouveau sont considérées comme minimes.
L’entrée en PMA : un parcours du combattant
Malgré un diagnostic peu encourageant, Caroline et son mari décident de se lancer dans un protocole de fécondation in vitro (FIV). Très vite, ils découvrent que la PMA n’est pas seulement un traitement médical, mais un véritable parcours du combattant, exigeant sur tous les plans : physique, psychologique et émotionnel.
Dès le départ, le quotidien s’organise autour des stimulation hormonales. Ces injections, souvent douloureuses, provoquent ballonnements, douleurs abdominales et sautes d’humeur.
Les rendez-vous médicaux se multiplient : prises de sang, échographies de contrôle, examens invasifs… chaque matin ou presque, il faut se rendre à la clinique. Le corps devient un terrain d’expérimentation, surveillé en permanence, tandis que la spontanéité disparaît. La PMA impose son propre rythme, souvent en décalage complet avec la vie familiale ou professionnelle.
À cela s’ajoute un langage médical froid et déshumanisant. Les médecins parlent en termes de “production” ou de “réserve”, comme si tout se résumait à des chiffres et des statistiques.
Malgré tous ces efforts, la réalité est cruelle : la première FIV ne peut aboutir et les tentatives suivantes restent sans succès. À chaque cycle, le même scénario se répète : un immense espoir au moment de l’insémination, suivi de quinze jours d’attente interminable, et enfin, l’effondrement lorsque le test se révèle négatif. La douleur est double : celle de l’échec médical et celle du rêve qui s’écroule encore une fois.
Le poids psychologique et la charge mentale
La PMA ne se résume pas à une succession d’actes médicaux : elle entraîne une véritable tempête émotionnelle. Caroline raconte qu’elle pleurait pour un rien, épuisée par cette montagne russe hormonale et psychologique. À cela s’ajoutent les rendez-vous médicaux quasi quotidiens, les prises de sang et les échographies qui rythment les journées, réduisant peu à peu l’espace pour une vie “normale”.
Ce qui rend l’épreuve encore plus difficile, ce sont les mots parfois brutaux du corps médical. Plutôt que de considérer son couple comme deux personnes porteuses d’un désir d’enfant, certains praticiens ramènent tout à son âge, à ses statistiques, à ses faibles chances de réussite. Caroline se sent réduite à un dossier, à un “utérus vieillissant”, perdant confiance non seulement en la médecine mais aussi en son propre corps, perçu comme défaillant.

Cette charge mentale déborde également sur la vie familiale. Ses enfants, bien qu’épargnés des détails du parcours, perçoivent l’atmosphère lourde à la maison. Le frigo se remplit de traitements, les vacances se planifient en fonction du calendrier biologique, chaque sortie doit tenir compte des injections à heure fixe. La PMA s’immisce partout, jusque dans les moments de loisirs, rappelant sans cesse l’objectif encore inaccessible.
Retrouver l’espoir grâce à la résilience
La rencontre d’un médecin bienveillant
À bout de forces après des mois de traitements et d’échecs, Caroline décide de changer de cap et de chercher un autre accompagnement médical. Ce choix, loin d’être anodin, marque une rupture symbolique : il s’agit de se donner une nouvelle chance, mais surtout de sortir d’une relation médicale où elle se sentait réduite à son âge et à ses statistiques.
La rencontre avec un nouveau médecin transforme son vécu. Dès la première consultation, Caroline perçoit une écoute véritable et une attention sincère à son histoire. Ce praticien ne se limite pas à analyser ses résultats biologiques : il prend le temps de considérer son couple, d’entendre son désir d’enfant dans toute sa profondeur.
Cette humanité change tout. Même lorsque de nouveaux examens révèlent des analyses encore plus mauvaises que précédemment, Caroline ne ressent plus l’écrasement du verdict médical. Au contraire, elle reprend confiance. Non pas parce que les chiffres se sont améliorés, mais parce qu’elle sent à nouveau que quelqu’un croit en elle et en leur projet. Ce regard bienveillant redonne à Caroline la force de continuer.
Une pause nécessaire
Après près de deux ans de protocoles lourds, d’attente et de déceptions, le couple décide de faire une pause salutaire. Cette décision, parfois difficile à prendre, s’avère pourtant essentielle : il faut savoir souffler, reprendre des forces et retrouver une identité en dehors du parcours médical.
Caroline va jusqu’à quitter son travail, marquant un vrai tournant dans sa vie. Elle ressent le besoin de tourner la page sur cette période épuisante et de se recentrer sur elle-même, sur son couple, et sur ses enfants déjà présents.
Pendant ce temps, elle découvre la puissance des témoignages et des récits d’autres femmes. Ces voix brisent l’isolement, normalisent ses émotions et l’aident à mettre des mots sur ce qu’elle traverse. .
Cette pause n’efface pas la douleur, mais elle agit comme une respiration thérapeutique. Caroline cesse de se définir uniquement par son désir d’enfant, reprend possession de son quotidien et retrouve peu à peu un équilibre intérieur.
Le miracle : débuter une grossesse naturelle à 42 ans
Première étape : un test positif inattendu
Le 30 septembre 2019, une date déjà symbolique puisqu’il s’agit de leur anniversaire de mariage, Caroline vit un moment hors du temps. Ce matin-là, alors qu’elle n’attend plus rien, elle réalise un test de grossesse et découvre avec stupeur deux barres positives. L’émotion est indescriptible : après deux ans de protocoles médicaux lourds, d’échecs répétés et de désillusions, c’est finalement de manière naturelle que la vie s’invite à nouveau dans leur histoire.
Ce test positif a un goût de revanche. Pour Caroline, il incarne la preuve que malgré les pronostics sombres, malgré les analyses catastrophiques et les discours décourageants, le corps peut encore surprendre. Ce jour-là, la joie se mêle à l’incrédulité. Elle achète d’autres tests pour s’assurer que ce n’est pas une illusion. Chaque résultat confirme la réalité : oui, elle est enceinte.
Parcours PMA : une grossesse sous haute émotion
Si la joie est immense, la peur reste évidemment omniprésente. Caroline n’a pas oublié la douleur de sa fausse couche, ni le silence du cœur qui s’était arrêté deux ans plus tôt. Chaque symptôme est scruté, chaque rendez-vous médical devient une étape capitale.
Paradoxalement, les nausées intenses qui apparaissent dès les premières semaines sont vécues comme un signe rassurant. Elles témoignent d’une grossesse bien installée, d’un corps qui fonctionne à nouveau. Cette fois-ci, les sensations physiques ne sont pas perçues comme des désagréments, mais comme des preuves tangibles que l’espoir est permis.
L’accompagnement médical joue également un rôle déterminant. Le nouveau médecin, bienveillant et à l’écoute, continue de les suivre. Chaque échographie, chaque analyse est réalisée avec attention et respect, redonnant confiance au couple.
L’accouchement après une PMA : une revanche sur la douleur
Le 15 juin 2020, après trois années d’attente, d’épreuves et d’espoir, Caroline met au monde une petite fille. Cet accouchement est à mille lieues de ses expériences passées, souvent marquées par la douleur, les interventions lourdes et la fatigue. Cette fois-ci, tout se déroule dans une atmosphère étonnamment douce et sereine.
L’équipe médicale, attentive et respectueuse, instaure un climat de confiance. Chaque geste est expliqué, chaque choix validé avec Caroline, qui se sent pleinement actrice de son accouchement.
Pour Caroline, c’est une revanche symbolique : accoucher dans le même hôpital où elle avait vécu son aspiration deux ans plus tôt. Cette fois, la douleur laisse place à la vie, à la joie et à l’apaisement.

L’après : savourer chaque instant et redécouvrir la maternité
Accueillir un bébé vingt ans après la naissance de son premier enfant change radicalement la manière de vivre la maternité. Plus expérimentée, plus consciente du temps qui passe, Caroline savoure chaque geste, chaque sourire, chaque éveil comme un trésor. Elle sait combien ce cadeau est fragile, rare et précieux, et refuse d’en perdre la moindre miette.
Son mari, qui devient père pour la première fois à travers cette naissance, s’implique totalement. Loin d’être un “assistant”, il est un véritable co-parent, engagé dans chaque soin, chaque réveil, chaque moment tendre. Ce partage à parts égales apporte à Caroline un soutien inédit, bien différent de ses expériences passées où elle avait parfois porté seule le poids du quotidien avec un nourrisson.
Ce qu'il faut retenir :
L’histoire de Caroline est celle d’une renaissance après l’épreuve. Une fausse couche bouleversante, un parcours de PMA éprouvant, puis une grossesse naturelle inespérée qui a mené à la naissance d'une petite fille.
La PMA n’est pas seulement une affaire médicale : c’est un chemin intime où la résilience, le soutien du couple et l’humanité des soignants jouent un rôle aussi important que les traitements.
Alors si vous êtes dans une situation similaire à celle de Caroline, il est important de changer de médecin si nécessaire, ne pas rester seule et préserver son couple tout au long du parcours PMA. Et même si c'est difficile, essayer de ne pas culpabiliser : l’infertilité et la fausse couche ne sont pas des fautes, mais des réalités médicales qui peuvent être surmontées.
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